En attendant les repousses d’herbe, garder les brebis en bon état
Des stocks suffisants pour passer l’hiver ?
La première étape avant d’envisager des solutions est d’estimer ce qu’il va manquer comme stock de fourrage pour passer l’automne et l’hiver (tableau ci-dessous) sachant que des précipitations importantes permettraient de remettre les brebis à l’herbe cet automne et dans certains cas, une partie de l’hiver.
Catégorie d'animaux | Quantités de foin nécessaires (en brut pour 100 animaux) |
---|---|
Brebis en fin de gestation (pour les 4 dernières semaines) | 3 tonnes |
Brebis en lactation (pour 80 jours) | 16 tonnes |
Brebis vides, en lutte et milieu de gestation (pour un mois) | 4,5 tonnes |
Agnelles de renouvellement (pour un mois) | 2,5 tonnes |
Agneaux du sevrage à l’abattage | 2 tonnes |
Tableau. Des données indicatives de consommation de foin selon le type d’animaux (hors refus importants et gaspillage)
Ne pas laisser maigrir les brebis
La meilleure solution pour ne pas avoir des brebis maigres aux deux stades clefs que sont la mise à la reproduction et la fin de gestation est de ne pas les laisser maigrir en amont. Les brebis taries ou en milieu de gestation se satisfont de foin de qualité moyenne, à condition toutefois qu’elles soient en bon état corporel (notes de 3 ou plus sur une échelle de 0 à 5). Les brebis maigres sont alors triées et complémentées à raison de 300 g de céréales par brebis et par jour. Une autre solution consiste à leur distribuer de l’enrubannage.
Pas de flushing pour les brebis en état
Si les brebis qui vont être prochainement mises en lutte sont en bon état (notes de 3 ou plus sur une échelle de 0 à 5), il est inutile d’ajouter des céréales à la ration déjà composée de foin. Si elles ne maigrissent pas pendant la période de lutte, elles seront aussi fertiles. Le taux de prolificité ne sera pas diminué non plus sans apport de céréales pour assurer un flushing. Il restera de toute façon inférieur à celui de luttes avec de l’herbe pâturée. Par contre, si les brebis sont assez maigres (note d’état corporel de 2), la distribution de 300 à 500 g de céréale par jour 3 semaines avant le début de la mise aux béliers et jusqu’à ce qu’elles soient remises à l’herbe va augmenter le nombre d’agneaux vendus de 6 à 12 pour 100 brebis mise en lutte.
Répartir au mieux les fourrages entre les lots
Un autre levier consiste à faire coïncider au mieux la qualité du fourrage et les besoins des animaux afin de distribuer le moins d’aliment concentré possible (tableau). Par exemple, les fourrages stockés de très bonne qualité (enrubannage et foin) sont à réserver aux brebis qui allaitent. Les analyses pour déterminer leurs valeurs alimentaires sont alors d’une aide appréciable. Compter environ 35 € pour une analyse simple.
Type d'animaux | Bon foin de graminées | Enrubannage de graminées | Foin ou enrubannage de luzerne | Foin moyen de graminées | Paille |
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Allaitantes | XXX | XXX | XXX | XX | X |
Fin de gestation | XX (attention aux prolapsus si fourrage à volonté) | XX (attention aux prolapsus si fourrage à volonté) | X | XX | X |
Entretien | XX | X | O | XXX | XX |
Agneaux en finition | O | X | XXX | XXX | XXX |
O : inadapté
X : possible sous conditions
XX : adapté
XXX : préconisé
Acheter de la paille ou du foin
Si les stocks d’herbe récoltés ne sont pas suffisants pour passer l’automne et l’hiver, il est possible de commander de la paille supplémentaire. Un camion de 18 tonnes livrées, soit environ 1 700 €, assure la ration de base de 200 brebis pendant 3 mois. Les rations à base de paille sont d’un bon rapport qualité/prix pour les agneaux en bergerie, avec les mêmes quantités de concentré qu’avec du foin de première coupe. La paille peut également de substituer au foin pour les brebis vides et en milieu de gestation avec un apport de céréale et pour les brebis en lactation avec une ration de base mixte foin/paille et un peu plus de concentré. Enfin, dans certaines régions, il est possible d’acheter du foin. Il est alors nécessaire de calculer le coût de la ration pour statuer.
Des leviers pour économiser du foin
Plusieurs alternatives sont envisageables pour économiser le stock de fourrage disponible :
- Rationner le foin et l’enrubannage afin de limiter le gaspillage sans pour autant pénaliser les performances des animaux. Les besoins d’une brebis sont couverts avec 1 à 1,5 kg brut de foin pour une brebis vide et gestante et entre 1,5 et 2 kg pour une femelle qui allaite,
- Opter pour des rations à base de paille pour les agneaux et les agnelles de renouvellement. Pour les brebis à l’entretien, l’apport de 300 à 500 g de céréales suffit avec une ration « paille » dans la mesure où elles sont en bon état,
- Distribuer des rations mixtes, avec par exemple du foin le matin et de la paille le soir pour les brebis en fin de gestation et en lactation. Les quantités de concentré est alors à majorer pour équilibrer la ration
- Acheter des aliments riches en fibres qui autorisent une économie de 40 à 50 % de fourrage grossier. Sur ce sujet, consultez votre distributeur d’aliments pour en déterminer l’intérêt économique par rapport aux autres solutions.
Saisir les opportunités de pâturage cet automne et cet hiver
Le troupeau peut également bénéficier d’opportunités avec d’autres surfaces que les prairies dès que la pluie sera revenue, sur l’exploitation ou bien en dehors. C’est le cas par exemple :
- des couverts végétaux semés en intercultures : adaptés à tous les types d’animaux en automne et en hiver sous réserve d’espèces adaptées aux ovins avec par exemple les pois, l’avoine….
- des prairies des bovins : pour les brebis vides ou en milieu de gestation et les agnelles de renouvellement en hiver,
- des vergers, des vignes : pour les brebis vides ou en milieu de gestation en automne et en hiver,
- des surfaces pastorales : pour les brebis à faibles besoins à des saisons diverses selon leur type : bois, landes, friches, pelouses.
Des fins de gestation en bergerie
Les températures semblant devenir supportables pour les animaux en bâtiment, il est plus simple d’alimenter les brebis au cours des 4 à 6 dernières semaines de gestation en bergerie que de leur apporter la totalité de la ration dehors : foin et concentré. Compter alors 65 kg de matière sèche de foin par brebis pour la fin de gestation. Les quantités de concentré sont adaptées à la taille de la portée (voir tableau). Si les stocks de foin ne sont pas suffisants pour passer l’hiver, réserver la paille aux rations mixtes en lactation si cela est possible.
Tableau. Exemple de rations dans les trois dernières semaines de gestation avec du foin de qualité moyenne à volonté (par brebis et par jour).
Taille de la portée | UN agneau | Deux agneaux |
---|---|---|
Orge | 400g | 500g |
Tourteau de colza | 200g | 300g |
AMV 5-25 | 30g | 30g |
Source : Institut de l'Elevage
De la paille pour les agneaux
Si les stocks de foin sont insuffisants, il peut être remplacé par de la paille pour les agneaux sevrés. Les indices de consommation et qualités de carcasse ne sont pas modifiés par rapport à un foin de graminées. Compter environ 15 kg de paille par agneau fini en bergerie du sevrage à la commercialisation.
Ne pas faire d’impasse sur les agnelles
Les agnelles de renouvellement sont rentrées en bergerie ou bien laissées à l’herbe avec du foin de qualité moyenne sur une parcelle « sacrifiée ». Du concentré doit alors être apporté aux jeunes de l’année mises en lutte en fin d’année. Il faut alors compter 300 à 500 g par agnelle et par jour, du même type que celui des agneaux finis en bergerie.
Conserver les périodes de lutte habituelles
Faut-il retarder les luttes d’été compte tenu du manque d’herbe ? Non, car un tel choix aura des conséquences techniques et économiques sur les années à venir. Modifier ses périodes de reproduction se traduit en effet par une baisse des résultats et il faut compter deux à trois ans pour retrouver son système initial. D’autre part, un report des luttes en automne a des conséquences sur l’organisation du pâturage au printemps suivant et le volume des stocks à récolter. Dans tous les cas, mieux vaut conserver sa conduite la reproduction. Des périodes de lutte courtes (35 jours en lutte naturelle) et le recours au constat de gestation permettent de réaliser des économies en fin de gestation. Mais attention, si les brebis sont habituées aux luttes longues, il ne faut pas raccourcir cette durée sans s’être assuré qu’au moins 80 % des femelles mettent bas sur le premier cycle de lutte sous peine d’une contre-performance.
Remplacer la paille de paillage par une autre ressource
Si la paille doit constituer une part de la ration des brebis, il est possible de la remplacer en litière par une autre matière première, partiellement ou totalement. C’est le cas par exemple des plaquettes de bois. Les performances des animaux et leur bien-être ne sont pas modifiés. Le prix d’intérêt des plaquettes de bois est de l’ordre de 9,5€ le MAP (équivalent d’un m³ de plaquettes) pour un prix de la paille à 100 € la tonne par exemple (graphe ci-dessous). Il est également possible d’utiliser de la dolomie (une étude est en cours pour en déterminer l’intérêt économique).
Trier et vendre les réformes
Avec un marché porteur, il est conseillé de réformer le plus rapidement possible afin de limiter le nombre de brebis non productives sur l’exploitation :
- Lors du constat de gestation : les brebis adultes vides sur lutte d’automne, les récidivistes sur lutte de printemps et d’été,
- A la fin de l’agnelage : les femelles qui n’ont pas d’agneau,
- Au tarissement : les brebis qui ont atteint la limite d’âge, celles qui présentent des mammites et des boiteries etc…
Sauf avec de l’herbe de printemps, engraisser les brebis de réforme coûte trop cher ! Il est donc conseillé de les vendre en l’état. Mais ne vendez pas vos brebis productives et conservez votre politique de renouvellement : c’est le nombre d’agneaux vendus qui fait le revenu et la filière en a besoin!
Pour en savoir plus, vous trouverez les fiches techniques, vidéos et podcasts du CIIRPOsurwww.idele.fr (rubrique Réseaux et partenariats/CIIRPO) etwww.inn-ovin.fr