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Visite du dispositif expérimental OasYs

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Systèmes fourragers Climat Coûts de production Agroforesterie Elevage et Société Bovin lait
En 2030, comment permettre aux éleveurs et éleveuses de vivre de leur métier, dans un contexte de changement climatique et d’économie des ressources en eau et en énergie fossile ? OasYs est une expérimentation grandeur nature (72 VL, 91 ha) qui s’attelle depuis 2013 à répondre à cette question. L'enjeu est de tester des innovations sur l'adaptation au changement climatique des élevages bovins laitiers. Cette année, la visite a mis l'accent sur le croisement 3 races et les résultats technico-économiques du système.

Oasys en bref

Depuis 2013, INRAE expérimente l’adaptation d’un système bovin laitier au changement climatique dans une zone de Poitou-Charentes soumise à des sécheresses estivales, au sein de l’unité Fourrages, Ruminants et Environnement. Toute une série de leviers agroécologiques sont mis en œuvre dans un dispositif nommé OasYs (72 vaches laitières, 91 ha), conduit sans irrigation et avec très peu d’intrants. L’adaptation au changement climatique est basée sur la diversification des ressources fourragères, la mise en place de deux périodes de vêlage et l’utilisation de plantes et d’animaux moins sensibles aux températures élevées. L’atténuation du changement climatique a été visée conjointement avec l’adaptation dès la conception du système, et les leviers sont organisés de manière coordonnée à l’échelle de la ferme. L’objectif de ce nouveau système bovin laitier est de permettre aux éleveurs et éleveuses de vivre de leur métier, dans un contexte de changement climatique et d’économie des ressources en eau et en énergie fossile, tout en préservant l’environnement et en contribuant au bien-être animal.

Un système fourrager diversifié, conçu pour maximiser le pâturage

Le système fourrager comporte trois rotations dont deux sont pâturables et la troisième a pour vocation de fournir des fourrages conservés, de la paille et du grain. Les espèces prairiales et les cultures annuelles sont diversifiées à la fois sur l’assolement et au sein des parcelles. Les prairies associent diverses graminées, légumineuses et dicotylédones, avec des espèces et variétés différant pour chacune d’entre elles, de manière à avoir un large panel de précocités et d’aptitudes à pousser aux différentes saisons et sous des conditions climatiques variées. Des cultures annuelles prennent le relai des prairies afin d’allonger la saison de pâturage, avec par exemple des betteraves fourragères, du sorgho multicoupe ou du méteil. Afin de diversifier les stocks, les fourrages conservés comportent, en plus de l’herbe, du sorgho monocoupe, du maïs et des méteils. Le sorgho et les méteils sont à double fin et peuvent être pâturés ou récoltés selon les conditions climatiques de l’année. Des plantations de ligneux sont un élément supplémentaire de cette diversification, les arbres ayant pour principale vocation de fournir du fourrage et de l’ombrage pour les vaches en été et en début d’automne.

 

Le croisement trois races pour un troupeau productif et rustique

La stratégie d’élevage vise à mettre en phase les besoins des animaux avec la disponibilité en fourrages pâturés, ainsi qu’à limiter les périodes improductives et les problèmes sanitaires au cours de la carrière de la vache. Pour cela, deux périodes de vêlage centrées sur le printemps et l’automne ont été mises en place, les lactations ont été allongées à 16 mois et un croisement rotatif à trois races (Holstein, Rouge Scandinave, Jersiaise) a été initié. Ces races ont été retenues pour leurs caractéristiques propres et complémentaires, à avoir une bonne production laitière pour la Holstein et la Rouge Scandinave, une fertilité élevée pour la Rouge Scandinave et la Jersiaise, et un petit format, des taux butyreux et protéique élevés et une résistance à la chaleur pour la Jersiaise.

Les résultats de reproduction sont très bons à la fois grâce à l’allongement des lactations qui permet de déconnecter la mise à la reproduction du pic de lactation, et aux croisements avec la Rouge Scandinave et la Jersiaise.

Le sens de croisement a un léger impact sur les teneurs en matière utile, avec des valeurs légèrement supérieures en moyenne pour le croisement (Ho×Rs)×Je comparé au croisement (Ho×Je)×Rs.

 

OasYs, un système rentable

A l’échelle de l’atelier lait, les résultats montrent une meilleure marge brute pour OasYs que pour les systèmes pâturant plus traditionnels, grâce à l’augmentation des taux de matière grasse et protéique, et à une diminution des charges opérationnelles. En effet, l’allongement de la période de pâturage permet de réduire fortement l’utilisation de concentrés et les coûts d’alimentation.

L’évaluation technico-économique à l’échelle de la ferme a été réalisée en prenant l’hypothèse qu’elle fonctionnait avec 1,5 unité de main d’œuvre prenant en charge les activités d’élevage et les récoltes d’herbe, alors que les autres activités (semis, épandage, fertilisation, conduite des cultures annuelles) étaient déléguées en travaux par tiers. Les résultats montrent que le système a permis de rétribuer plus de 3 SMIC par unité de main-d’œuvre en 2022, bien que les conditions climatiques de cette année aient été difficiles. Même en considérant une absence d’aide et 2 unités de main d’œuvre, la rémunération permise par unité de main d’œuvre reste supérieure à 2 SMIC.