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Une PAC complexe... et transitoire (448-Juillet-Août 2014)

Dossier spécial PAC

Publié le par Groupe Economie du Bétail GEB (Institut de l'Elevage)
Marchés Lait et viande Bovin lait Ovin lait Bovin viande Caprin Equin Ovin viande
La PAC modèle 2014-2019 est issue de pratiquement 5 ans de négociation. Elle est forcément complexe, tant les écarts restent importants entre les 28 pays membres, voire entre les secteurs agricoles. Ce dossier explique aussi clairement que possible cette réforme et les choix français. Les impacts, a priori sur les principaux systèmes d'élevage sont simulés.

 

 

Au terme d’une négociation encore plus longue que pour les précédentes réformes, la PAC est devenue plus complexe encore, quand la simplification était un des objectifs affichés de la réforme. Cela aboutit à une PAC encore davantage à la carte que la précédente. A tel point que mesurer dès aujourd’hui ses effets probables dans tel ou tel pays s’avère compliqué*.

 

Le démantèlement des outils de régulation se poursuit, et la Commission européenne, comme la majorité des États membres, rechignent à inventer des mécanismes pour traiter la volatilité des prix. Le "paquet lait", né des mouvements sociaux liés à la crise de 2009, donne une réponse très partielle. Une enveloppe budgétaire pluri-annuelle "en cas de crise grave" est bien mise en place. Mais en même temps on continue à négocier activement des accords de "libéralisation commerciale" (avec le Canada, les Etats-Unis, le Mercosur…) qui se traduisent par des baisses de droits de douane et des augmentations de contingents à droit nul…

 

Sous la pression de certains États membres, dont la France, cette réforme introduit cependant des avancées potentielles. Ainsi, le budget des aides couplées peut-il augmenter, jusqu’à 15% du premier pilier, en rupture avec l’orientation depuis l’agenda 2000. Ainsi encore, la possibilité de paiement redistributif, sur-dotant les premiers hectares, pour atténuer la pénalisation de la convergence des aides. De même la possibilité de réaliser des paiements aux zones défavorisées ou aux jeunes agriculteurs au sein du 1er pilier. Le chapitre 1 de ce document explique aussi simplement que possible l’ensemble des options disponibles pour cette nouvelle PAC, et détaille les choix de la France.

 

Un budget de la PAC amputé… mais la France s’en sort mieux

 

Le budget de la PAC a été amputé : il recule de 10% par rapport au précédent, quand le budget global de l’UE n’est réduit que de 3,4%. Dans ce contexte, les négociateurs français ont bien tiré leur épingle du jeu, les fonds européens au bénéfice de l’agriculture française ne diminuant que de 2% sur la période malgré les effets de la redistribution vers les nouveaux pays membres, grâce à la hausse du budget négocié pour le cofinancement du 2nd pilier. La baisse du budget français des aides directes (1er pilier + ICHN-PHAE) pourrait atteindre près de 600 millions d’euros en 2019 par rapport à 2011 (hors nouvelles MAE). Pour l’élevage, cette baisse devrait être limitée à quelques dizaines de millions d’euros (cf chapitre 2).

 

Une orientation pro-élevage, mais une grande diversité d’impacts

 

L’impact de la réforme sera bien sûr très disparate d’une exploitation à l’autre, en particulier en fonction des références historiques. En effet, la convergence des aides, même si elle reste limitée en France à 70% en 2019, pénalise les élevages les plus intensifs. La sur-dotation aux premiers ha ou la création d’une prime couplée à la vache laitière atténuent les effets de cette convergence, avec des effets disparates, par exemple en fonction du statut juridique (GAEC ou non).

 

Le choix français de renforcer le soutien aux territoires défavorisés ou fragiles mobilise 1,1 milliard d’euros par an : c’est une politique majeure d’aménagement du territoire. Cette volonté de compenser davantage les handicaps des zones difficiles ne suffira cependant pas à elle seule à y assurer la poursuite d’activités d’élevage dynamiques, vus les écarts croissants de revenus avec les zones de plaine.

 

L’application de la PAC en France est bien, dans ses objectifs comme dans ses effets simulés dans ce document, dans la continuité de celle du "bilan de santé" de 2008, en préservant autant que possible les soutiens aux activités d’élevage. L’hétérogénéité des impacts sur les aides directes de chaque catégorie d’exploitations est illustrée dans le chapitre 2 à partir de simulations à système constat sur la base du RICA. Le chapitre 3 permet des simulations plus fines en se basant sur les "cas-types" des Réseaux d’élevage, en distinguant les effets à court terme (2015) et à moyen terme (2019), et en illustrant les adaptations possibles des systèmes d’exploitation à la nouvelle donne.

 

Penser la PAC du futur

 

Car, bien entendu, les systèmes d’élevage évolueront, comme ils n’ont cessé de le faire. La PAC impulse des orientations, tout spécialement en France. Mais il serait risqué de conseiller aux éleveurs de caler leurs évolutions de systèmes, qui sont des choix stratégiques, uniquement sur cette PAC. Car elle risque bien d’être à nouveau réformée avant terme, vu les habitudes depuis 2000, les contraintes budgétaires croissantes, et les choix à rebours de la plupart des politiques agricoles ailleurs dans le Monde, en particulier du Farm Bill étatsunien.

 

Comment la PAC traite-t-elle les principaux enjeux de la période ?

 

D’un côté, la modernisation des exploitations voit son financement renforcé en France, dans le cadre du 2nd pilier, avec des priorités qui seront définies région par région. De même de nombreux outils sont mis en place pour une meilleure prise en compte de l’agro-écologie, mais les systèmes polyculture élevage sont parmi les plus pénalisés par la convergence des aides.

 

D’un autre côté, les instruments de gestion des aléas, surtout de marché, ne sont qu’à peine ébauchés dans cette nouvelle PAC pour le secteur de l’élevage. La Commission européenne considère que les soutiens directs sont une forme d’assurance face à ces aléas de marché… ce qui n’est pas vérifié pour la plupart des exploitations d’élevage ruminant en France si on se réfère aux évolutions de revenus depuis 2007.

 

*Nous relèverons pourtant le défi en organisant la conférence "La PAC dans tous ses Etats" le 20 novembre prochain à Paris

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