Dossier contrats laitiers - États des lieux en 2016 (474 - décembre)
Dossier Economie de l'Elevage - N°474 - Décembre 2016
Depuis la suppression des quotas laitiers en 2015, l’offre laitière n’est plus régie par des règles administratives mais par les entreprises laitières au travers de la contractualisation. Ce passage d’une régulation publique à une régulation privée a été encadré par des dispositions adoptées par la France suite à la crise de 2009 et par l’adoption du paquet lait qui accorde des dérogations aux règles de la concurrence afin de renforcer le pouvoir des éleveurs.
Le législateur a imposé la contractualisation commerciale aux collecteurs privés et coopératifs pour garantir une assurance débouché durant au moins cinq ans aux éleveurs laitiers qui, livrant un produit périssable sur un marché excédentaire et instable, n’ont aucun pouvoir individuel de négociation. Réalisée dans la précipitation, la 1ère génération de contrat s’est opérée à front renversé : elle a, de fait, plutôt renforcé la subordination des éleveurs à leur collecteur car ils ont certes bénéficié d’un contrat commercial, mais n’ont pu le négocier collectivement faute de pouvoir se regrouper préalablement en Organisations de producteurs (OP) agréées.
Ce Dossier Économie de l’Élevage réalise un état des lieux pour 2016 des principales dispositions (volume et prix) des contrats commerciaux ou coopératifs entre les laiteries et les éleveurs. La plupart des collecteurs privés ont imposé des règles contraignantes, voire très contraignantes afin d’ajuster leur collecte à leurs besoins et donc à leurs débouchés. Les coopératives laitières, qui doivent collecter tout le lait de leurs adhérents, ont adopté des dispositions plus ou moins dissuasives en fonction de leurs capacités et débouchés commerciaux et du potentiel de production de leur bassin de collecte. L’analyse comparée des clauses contractuelles (volume et prix du lait) met en lumière des contrastes croissants selon les laiteries : certains éleveurs bénéficient de faibles contraintes de volumes et de prix plutôt élevés et peu volatils, tandis que d’autres, à l’opposé, perçoivent un prix du lait plus faible et volatil malgré des contraintes fortes sur les livraisons. De tels écarts dépendent de plusieurs facteurs : le mix- produit, le portefeuille de marques et les débouchés des transformateurs, mais aussi le bassin laitier (sa densité et son dynamisme) où sont implantés éleveurs et transformateurs.
Ce Dossier Économie de l’Élevage met aussi en lumière le pouvoir de négociations aujourd’hui encore limité des organisations de producteurs, presque toutes adossées à un seul transformateur, dont le rôle dépend du bon vouloir de celui-ci. Désormais très nombreuses, elles sont parfois plus concurrentes que coopérantes dans certains bassins ou auprès de quelques transformateurs. Ce paysage émietté pourrait cependant évoluer grâce à la loi Sapin 2 adoptée en 2016. Celle-ci veut renforcer le poids des producteurs dans les négociations, accroître la transparence des relations commerciales et améliorer la répartition de la valeur ajoutée. Concrètement, elle renforce le rôle et le pouvoir des OP qui deviennent des interlocuteurs incontournables des collecteurs laitiers.