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Dossier annuel Bovins lait, Année 2022 - Perspectives 2023 - (Dossier économie n°537 - Février 2023)

n° 537 Février 2023

Publié le par Groupe Economie du Bétail GEB (Institut de l'Elevage)
Marchés Lait et viande Revenu des éleveurs Bovin lait
L’année 2022 entrera probablement dans les annales de l’histoire : en raison de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, dont les effets économiques et géopolitiques sont considérables, mais aussi en raison d’un été climatique exceptionnel, révélateur du changement climatique à l’œuvre...

Tout d’abord, la guerre en Ukraine a accentué la hausse des cours de l’énergie, principalement du gaz puis de l’électricité, mais aussi des grains, qui avait démarré au milieu de l’année 2021 avec la reprise de l’économie mondiale. Leur flambée s’est répercutée rapidement sur les prix des intrants agricoles, provoquant un bond de l’IPAMPA lait de vache, de +19% d’une année sur l’autre, puis des cours des commodités laitières et du prix du lait, de même ampleur en France (+20% /2021).

Ensuite, les éleveurs ont dû faire face à une année climatique historiquement chaude et sèche qui a amputé la production fourragère dans tous les bassins laitiers. Malgré ces aléas, les exploitations laitières françaises ont dans leur ensemble amélioré leur revenu, grâce à la hausse du prix du lait, mais aussi de la viande et des céréales. Toutefois, les écarts de revenu n’ont jamais été aussi élevés entre et au sein des principaux systèmes. Les revenus des exploitations de polyculture-élevage ont atteint des sommets historiques grâce notamment aux céréales, tandis qu’ils ont plafonné dans les exploitations laitières de montagne, et se sont encore dégradés dans les exploitations laitières bio.

En France, la remontée plutôt modérée, en comparaison avec le reste de l’UE, du prix du lait à la production n’a pas relancé pour autant la production laitière, handicapée par une érosion encore plus marquée du cheptel et des disponibilités fourragères limitées. La hausse des prix au détail a impacté les achats des ménages, même si la consommation totale (tous circuits) a plutôt bien résisté. La crise de surproduction dans la filière laitière bio s’est exacerbée, malgré une production moins dynamique mais face à une demande en berne.

Dans l’UE-27, en revanche, la forte remontée du prix du lait a redynamisé la production laitière dans la plupart des pays d’Europe du Nord au 2nd semestre, si bien que la collecte européenne a été stable d’une année sur l’autre. Dans le même temps, la demande européenne a plutôt bien résisté à la hausse des prix, aidée de plus par l’afflux de près de 5 millions de réfugiés ukrainiens. Les exportations de produits laitiers vers les pays tiers ont fléchi en lien notamment avec le ralentissement de la demande chinoise.

La reprise de la production européenne devrait se prolonger au 1er semestre 2023, même si le prix du lait subit de substantiels correctifs en Europe du Nord dans le sillage du reflux des cours des commodités laitières. Pour autant, l’incertitude demeure entière sur l’évolution de la production et des marchés des produits laitiers. En effet, ils dépendent de nombreux facteurs climatiques, macro-économiques, géopolitiques, de plus en plus imprévisibles… Plus probable : la consommation de produits laitiers risque de s’effriter sous l’effet d’une inflation encore élevée en 2023, auquel cas les disponibilités en produits laitiers pourraient être plus étoffées pour l’export !