Les symptômes de la tumeur enzootique nasale

La tumeur enzootique nasale est un cancer de la muqueuse nasale se développant chez les chèvres et moutons. Elle associe des lésions de la face, des déformations crâniennes, dans certains cas des exophtalmies (oeil semblant sortir de son orbite) et des écoulements nasaux ; elle entraine la mort de l'animal en quelques semaines après l'apparition des signes cliniques. La tumeur se développe et envahit les cavités nasales par la prolifération anarchique des cellules cancéreuses.

Elle reste localisée à la muqueuse nasale et n'entraine pas de formation de métastases, c’est-à-dire la dissémination et l'établissement des cellules tumorales dans d'autres organes.

Une extension mal connue

La tumeur enzootique nasale est présente dans toutes les régions du monde et sévit en France dans les différentes régions d'élevage caprin.

Souvent décrite comme une maladie sporadique, elle peut aussi être responsable d'enzooties, c’est-à-dire de foyers épidémiques géographiquement localisés, comme nous l'avons récemment observé.

Faute de diagnostic de routine, les prévalences d'infection et de maladie sont inconnues en France.

Il nous semble pourtant important de sensibiliser la filière à ces maladies, pouvant ponctuellement entrainer de lourdes pertes économiques, et de mettre en place les mesures pour éviter la large dissémination dans les troupeaux caprins et ovins.

En cause, un rétrovirus...

La tumeur nasale est induite par le virus ENTV (Enzootic Nasal Tumor Virus) appartenant à la famille des Retroviridae. Les rétrovirus sont des virus enveloppés dont le génome est composé d'ARN (acide ribonucléique) et qui infectent de nombreuses espèces animales (homme, bovins, félins, poissons …). Parmi les rétrovirus, nombreux sont ceux étant responsables de cancers. Pour exemple HTLV1 (human T cell leukemia / lymphoma virus type 1) est responsable chez l'homme de leucémie / lymphome T de l'adulte et MMTV (Mouse Mammary Tumor Virus) induit des tumeurs de la glande mammaire chez la souris.

Les chèvres et moutons sont infectés par plusieurs rétrovirus (Fig 2) : Les lentivirus des petits ruminants ou SRLV (Small Ruminant Lentivirus) regroupant les virus communément appelés CAEV (Caprine Arthritis Encephalitis Virus) ou Visna- Maedi sont responsables de maladies dégénératives et inflammatoires avec des atteintes de la mamelle, du poumon, des articulations ou du système nerveux central Les béta-rétrovirus ENTV (Enzootic Nasal Tumor Virus) induit des tumeurs nasales Le béta-rétrovirus JSRV (Jaagsiekte Sheep Retrovirus) est responsable de cancers du poumon. Une caractéristique essentielle des rétrovirus est leur persistance chez l'hôte infecté. Une étape essentielle du cycle viral est l'intégration du génome viral dans le génome de l'hôte ; aussi comme chez les chèvres infectées par CAEV, l'animal infecté le restera jusqu'à sa mort.

Des mesures de maîtrise limitées

La prise en charge en élevage est malheureusement limitée, aucun traitement n'est disponible. Il est important d'isoler immédiatement et d'éliminer les animaux présentant des signes cliniques pour éviter la transmission du virus ENTV notamment par voie respiratoire. D'autres voies de contamination telles que le lait et le colostrum ont été montrées pour le virus apparenté JSRV; ENTV est donc très probablement également transmis par ces voies.

De nombreuses voies en termes de recherche

Notre équipe développe plusieurs projets de recherche sur les béta-rétrovirus oncogènes des petits ruminants dont ENTV qui visent à :

• détecter et caractériser les souches virales dans les élevages,
• élaborer un dépistage ante clinique,
• comprendre les mécanismes conduisant de l'infection au développement de cancer,
• et caractériser les souches associées à des épisodes cliniques graves.

Pour plus d'information :

• Monot, M., F. Archer, M. Gomes, J. F. Mornex, and C. Leroux. 2015. Advances in the study of transmissible respiratory tumours in small ruminants. Vet Microbiol 181:170-177. http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26340900

• Pour tout renseignement, n'hésitez pas à nous contacter Caroline.leroux@univ-lyon1.fr