Retour

Instaurer un ordre de traite

Publié le par Renée de Crémoux (Institut de l'Elevage)
Qualité des produits laitiers Santé Traite Caprin
Les mamelles des primipares sont stériles à l'origine. La majeure partie d'entre elles est donc saine en début de lactation d'où l'idée de mettre en place un ordre de traite avec passage des primipares en premier. Cette stratégie est-elle payante ?

Pourquoi mettre en place un ordre de traite ?

Photo R. de Cremoux

La mise en place d'un ordre de traite est une action préventive. Elle vise à diminuer les risques de transmission passive des bactéries.

         

 

En toute rigueur, il faudrait respecter un ordre de traite avec passage des animaux présumés sains en premier et passage des animaux présumés infectés en dernier.

 

Si l'on conseille habituellement de faire passer les primipares en premier à la traite, c'est que tout en permettant de limiter la transmission des infections, cet allotement répond également à d'autres problématiques, sanitaires ou de gestion du troupeau.

Préconisée pour la prévention de l’arthrite encéphalite caprine, la constitution d’un lot de primipares se justifie aussi sur le plan alimentaire, comme sur celui de la reproduction.

                

Pour quelle efficacité ?

 

Les mesures préventives sont rarement mises en place isolément. Chacune d'elles intervient dans la maîtrise des infections et il est souvent délicat de les évaluer indépendamment les unes des autres. Les résultats suivants sont donc simplement indicatifs.

               

Incidence sur la fréquence des infections

 

Les résultats présentés ici concernent 76 troupeaux de vaches laitières caractérisés par une fréquence des infections dues à Staphylococcus aureus supérieure à 10 %. Ces élevages n'ont pas changé leurs pratiques (désinfection des trayons, antibiothérapie) pendant la durée du suivi et ont réformé moins de 50 % des animaux infectés par Staphylococcus aureus. La seule variation a été la mise en place d'un ordre de traite dans 21 de ces élevages.

On constate que l'ordre de traite adopté a permis de limiter la transmission des infections : diminution significative de la fréquence des infections occasionnées par les staphylocoques dorés de 29,5 % à 16,3 %.

           

 

Incidence de la mise en place d'un ordre de traite sur la fréquence des infections à Staphylococcus aureus et sur les concentrations cellulaires de laits de tank

dans des troupeaux bovins

 

 

 

Dans cette étude, on constate également que la mise en place de l'ordre de traite n'a pas eu d'incidence déterminante sur les résultats de concentrations cellulaires. Les explications sont de deux ordres :

  • D'autres mesures que l'ordre de traite entrent en ligne de compte et cela inclut notamment les mesures dites "curatives" comme la réforme ou le traitement au tarissement, ou encore des mesures préventives complémentaires comme la désinfection des trayons.
  • Par ailleurs, les concentrations cellulaires des laits de tanks reflètent l’état sanitaire global du troupeau vis-à-vis des infections mammaires et pas uniquement le niveau d’infection par Staphylococcus aureus.

 

Incidence sur la fréquence des infections présumées et les concentrations cellulaires des laits de tanks

 

Les pratiques d'élevage de 50 troupeaux caprins caractérisés par un contexte de prévalence élevée (jusqu’à 80 % d’infections présumées) ont été analysées (de Cremoux, 2002).

La première année, l'ordre de traite a été instauré dans 27 exploitations ; la seconde année, 33 étaient concernées. Dans certains cas, l'ordre de traite n’a pu être pratiqué que jusqu’à la mise à la reproduction et / ou la mise au pâturage.

              

Les moyennes géométriques annuelles de concentrations cellulaires ont été :

  • en l'absence d'ordre de traite : 1 408 000 cellules par ml,
  • en cas d'instauration d'un ordre de traite : 1 312 000 cellules par ml.

                            

Attention : Ces différences ne sont pas forcement uniquement dues à l'ordre de traite, les éleveurs mettant souvent en place plusieurs mesures de maîtrise des infections mammaires simultanément.

 

Si on regarde plus précisément les résultats individuels de concentrations cellulaires des chèvres, on constate que :

  • la fréquence des infections présumées à "pathogènes mineurs" est diminuée lorsque les primipares sont traites en premier (risque relatif [1] de 0,92);
  • chez les primipares, la fréquence des infections présumées à "pathogènes majeurs" est également réduite (risque relatif de 0,67).

 

Conséquences

 

L'instauration d'un ordre de traite est une mesure intéressante. Son efficacité sera d’autant plus importante qu'elle sera associée à d'autres mesures de prévention.

 

Notes :

 [1]  Un risque relatif est une mesure statistique qui permet de comparer le risque de survenue d'un événement entre différentes populations. Un risque relatif supérieur à 1 signifie que le risque de survenue de l’évènement est augmenté. S'il est inférieur à 1, c'est que le risque de survenue de l'évènement est réduit.

 

Pour en savoir plus :

 

CREMOUX (de) R. Programme de contrôle des comptages de cellules somatiques (CCS) de troupeaux : mise au point, application et évaluation de stratégies de contrôle des CCS en élevage caprin. Compte rendu d’essai Institut de l’Elevage N°2023122, 2002, 70 pages.

CREMOUX (de) R., HEUCHEL V., CHATELIN Y-M. Evaluation de stratégies de contrôle des comptages de cellules somatiques des laits de mélange en élevage caprin. Renc. Rech. Ruminants, 2001. 8. 157-160.