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[Replay] Biologie, dynamique et gestion des Culicoides dans le cadre du contexte français

Intervention réalisée par Claire Garros (CIRAD) dans le cadre du webinaire animé par l'UMT PSR du 12 Novembre 2024

Publié le par Renée de Crémoux (Institut de l'Elevage), Fabien Corbière (ENV Toulouse)
Santé Pastoralisme Gestion du pâturage Climat Bovin lait Bovin viande Ovin lait Ovin viande Caprin
Dans un contexte d'extension ou d'émergence des maladies vectorielles et plus particulièrement de la MHE (Maladie Hémorragique Epizootique) et de la la fièvre catarrhale (FCO), la connaissance de la biologie des vecteurs est indispensable pour orienter les mesures de gestion et de prévention. L'écologie et la gestion des Culicoïdes ont ainsi été abordés par Claire Garros, chercheuse en entomologie médicale et vétérinaire au CIRAD

Claire Garros, chercheuse en entomologie médicale et vétérinaire au CIRAD de Montpellier, a présenté un ensemble d’aspects concernant la biologie, l'écologie et la gestion des Culicoïdes, insectes vecteurs de différents virus et notamment, pour ce qui concerne l’élevage des ruminants, des virus de la fièvre catarrhale (FCO) et de la MHE (Maladie Hémorragique Epizootique).

Retrouvez l'intervention en vidéo

Quelques points clés

Biologie et écologie des Culicoïdes : des caractéristiques et une diversité ayant un impact sur les mesures de contrôles envisageables

Plusieurs aspects de la biologie et de l'écologie des Culicoïdes sont succinctement synthétisés ci-après :

  • On répertorie environ 1 400 espèces de Culicoïdes au niveau mondial (une soixantaine vectrices) et une centaine en Europe de l’Ouest (une vingtaine vectrices).
  • Les Culicoïdes diffèrent des moustiques sur différents aspects, à commencer par leur taille (entre 1 et 3 mm), l’absence de trompe (dilacération de la peau à l’aide de leurs pièces buccales) ou encore le biotope des formes immatures (pas de stades aquatiques contrairement aux moustiques mais un développement dans des zones humides riches en matière organique).
  • La transmission des virus dépend de l’absorption du sang provenant d’un animal virémique. Le virus doit franchir les barrières intestinales et salivaires avant de pouvoir être transmis via la salive à l’occasion d’une prochaine piqûre. La durée de ce processus est estimée entre 10 et 15 jours à 25°C et semble dépendre, outre la température, des sérotypes viraux et des espèces vectrices.
  • Les Culicoïdes ont une activité essentiellement crépusculaire et piquent plutôt en extérieur (exophagie) mais l’importance de l’endophagie (piqure à l’intérieur des bâtiments) ne peut être négligée. Cette diversité de leurs comportements, fonction à la fois des espèces et des saisons, a des conséquences en termes de de gestion et de contrôle. Les zones d'attaque concernent surtout les zones dépourvues de poils comme les mamelles, les naseaux ou encore le contour des yeux.
  • Ces vecteurs ont des capacités de dispersion active (vol sur des distances estimées à 2 – 3 km par jour) et surtout passive grâce aux vents, leur permettant de couvrir de grandes distances. Le nombre de pics d’abondance et la temporalité (moment et durée) des périodes dites d’inactivité vectorielle, sont variables sur le territoire français avec en particulier des différences entre façade atlantique et zones plus continentales.

Lutte antivectorielle : de nombreuses questions et des défis à relever

Concernant la lutte antivectorielle, un ensemble de mesures sont généralement proposées en fonction de ce que l’on connaît de la biologie des vecteurs qu’il s’agisse de la gestion des habitats larvaires pour limiter l’abondance des Culicoïdes ou du confinement des animaux pour réduire les taux d’attaque. Néanmoins ces mesures n’ont pas fait, isolément, la preuve de leur efficacité en raison d’une part de la diversité et de l’ubiquité des habitats larvaires et d’autre part des limites de la protection assurée en bâtiment (tendance des Culicoïdes à entrer dans les locaux d’élevage, moustiquaires inadaptées, compromis à trouver en termes de ventilation et de bien-être animal).

L’efficacité et les modalités de désinsectisation demandent également à mieux être évaluées. Parmi les mesures collectives, les pulvérisations dans l’environnement ou les bâtiments n’ont pas montré d’effet sur l’abondance des populations adultes et l’impact réel de la désinsectisation des véhicules de transport (réglementaire) n’a pas été évalué scientifiquement. Sur le plan individuel, il n’existe pas de produits homologués spécifiquement contre les culicoïdes. Ceux-ci sont sensibles aux pyréthrinoïdes et organophosphorés, mais ces produits présentent une faible rémanence sur les animaux et par ailleurs, les traitements appliqués sur la ligne dorsale des ruminants ne protègent pas suffisamment les zones périphériques (mamelles, contour des yeux, etc.). Les quelques données obtenues dans des cadres expérimentaux témoignent d’une protection partielle des animaux (moins de 50 % de mortalité) et d’une absence de réduction significative du risque de transmission virale.

En conclusion, la lutte antivectorielle contre les culicoïdes est complexe et nécessite de développer des approches intégrées combinant un ensemble de mesures avec le souci conjoint de limiter les impacts environnementaux et sanitaires.