Les bonnes questions à se poser
Penser travail, une dimension incontournable pour un projet contention
Qu’il s’agisse de bergerie et de ses aménagements ou de contention,
l’objectif est toujours d’adapter le travail à l’homme et non l’inverse …
Les interventions collectives sur les animaux représentent un travail fréquent et qui prend du temps (le cumul du temps passé dans un parc de contention est souvent comparable au nombre d’heures annuel de bien des tracteurs…). La réalisation des interventions au bon moment est un gage de performance technico-économique, mais ce travail est sollicitant s’il est réalisé avec trop peu d’équipements ou avec des équipements mal agencés.
Le travail a une dimension physique, mais il recouvre beaucoup d’autres dimensions dont la subjectivité : est-ce que les interventions me font peur à l’avance ou est-ce que ça va bien se passer ? Est-ce que je peux « bien faire mon travail » ?
Un projet de parc de contention, c’est construire ses futures situations de travail de façon à trouver des solutions qui répondent favorablement à toutes ces questions au lieu de reporter les interventions, ne pas trouver le temps, se voir agacé – fatigué à l’avance, avoir mal au dos…
Un projet de contention est un projet à réfléchir pour permettre de réaliser l’ensemble des interventions dans de bonnes conditions de travail. Il sera donc à adapter aux besoins de chacun : les équipements dépendront du système de production et donc des interventions à réaliser, l’emplacement dépendra des bâtiments et du parcellaire, le niveau d’investissement et d’équipements variera en fonction de la taille du troupeau… A chacun de trouver la solution qui lui convient !
1 - Des éléments pour intervenir dans de bonnes conditions |
---|
Accéder facilement à la contention avec les animaux
On cherchera à pouvoir accéder au système de contention sans une durée excessive de déplacement et facilement. La facilité d’accès est liée à plusieurs éléments : le parcellaire (morcellement, éloignement…), avoir l’aide d’un chien efficace ou non, le nombre de personnes nécessaires, les risques au cours du trajet (traversée de route, effraction dans les parcelles des voisins…)
Choisir le type de parc de contention en réponse à son propre contexte
Le parc fixe
Si l’accès semble être toujours facile et d’une durée de déplacement acceptable, un parc fixe sera préférable. Le parc fixe présente des avantages : peu de préparation à réaliser avant l’intervention, il est toujours « prêt à l’emploi », il est possible de le couvrir et donc de travailler quelles que soient les conditions météo… Par contre, il demande d’engager une construction. Celle-ci peut être déléguée au moins en partie, mais il est souvent difficile de déléguer la totalité. L’auto-construction demande du temps qu’il ne faut pas sous-estimer (environ 30 jours de travail). Attention à cette impression qu’on y arrivera toujours ! Si la charge de travail est déjà importante, soit la construction durera longtemps (temps pendant lequel l’équipement ne sera pas utilisable), soit elle conduira à faire des impasses qui peuvent avoir des conséquences négatives sur les résultats. Des appuis sont possibles : l’entreprise, un salarié, l’entraide… Il est bien sûr plus facile de se mettre à plusieurs pour installer les équipements avec précision, pour que le chantier avance plus vite….
Le parc mobile
Si l’accès à un parc fixe est long et difficile, le parc mobile sera plus adapté. A l’acquisition, on veillera à ce qu’il réponde vraiment aux besoins identifiés, qu’il offre un bon compromis entre sa facilité et sa rapidité d’installation, sa légèreté (pour limiter les efforts et sollicitations du dos et des bras) et sa résistance aux animaux (pour éviter l’agacement et la perte de temps en cas de déplacement ou renversement des claies). L’acquisition d’un parc mobile se fait par achat le plus souvent. Sur certaines exploitations les deux types de parc sont nécessaires.
Les cornadis
Ils sont très pratiques quand les brebis sont en bergerie, donc sur place. Ils peuvent aussi être utilisé pendant la période de pâturage pour des brebis qui sont habituées au cornadis. Ils permettent de bloquer tout un lot de brebis et de réaliser pas mal d’interventions, trier (si le cornadis est équipé d’un déblocage individuel), vérifier l’identification, et toutes les interventions sur l’arrière de la brebis. Attention, lorsque le couloir est surélevé, traiter demande des positions sollicitantes pour le dos et/ou les genoux. Cependant des pistes sont intéressantes pour y remédier. Certains éleveurs traitent en étant sur l’aire paillée et débloque chaque brebis après traitement.
Travailler en toute sérénité
On cherchera à concevoir ou acheter un système qui allie de bonnes conditions de travail pour l’éleveur et soit compatible avec le comportement naturel des ovins.
Des moyens
La circulation fluide des animaux
Les ovins ont un instinct grégaire, ils se suivent…Cet aspect nous intéresse pour organiser leur avancée vers le poste de travail, sans avoir à se déplacer, les pousser, s’énerver, avoir le sentiment de perdre du temps... Pour cela des conditions sont incontournables (voir fiche « les 5 conditions pour une circulation fluide »). Bien sûr ces conditions sont une assurance pour travailler dans de bonnes conditions, mais avec des animaux rien n’est jamais garanti, d’autres éléments peuvent intervenir, des reflets ou des éblouissements, des bruits inquiétants, un trajet perturbé… Quid d’un chien comme auxiliaire de circulation fluide des animaux? La réponse ne semble pas univoque. Elle semble dépendre de 3 éléments : le type d’entrée dans le couloir (avec un entonnoir ou une cornue le chien est indispensable ), le type de comportement du chien et le type de relation de l’éleveur autant avec les brebis qu’avec le chien. Des éleveurs voient le rôle du chien comme primordial pour favoriser l’accès au couloir, d’autres au contraire trouvent que la poussée par le chien affole les brebis, les énerve et rende les interventions plus difficiles, voire imprime un rythme infernal difficile à suivre… A chacun d’expérimenter et de faire son choix !
Une aire de travail réservée à l’éleveur
L’agencement du parc de contention doit prévoir « une aire de travail réservée à l’éleveur ». Celle-ci permet de travailler sur un espace propre, sur lequel on peut entreposer tout ce qui est nécessaire pour les interventions prévues (document, pocket, carnet, matériel de marquage, matériel d’identification etc…). De plus l’éleveur travaille en dehors des animaux, sans se faire marcher sur les pieds ou cogner les genoux. L’aire de travail doit permettre de circuler tout le long du (des) couloir(s), et faire 1,5m de large minimum.
La circulation de l’éleveur
L’éleveur doit pouvoir accéder à toutes les aires du parc de contention sans enjamber : parc d’attente, parc de réception…Il pourra utiliser les portes de circulation des animaux, mais on rajoutera des portes pour traverser le couloir, une porte pour passer de l’aire d’attente à l’aire de travail et inversement et tout autre accès nécessaire… Les systèmes de fermeture des portes doivent être fiables et le sens d’ouverture des portes ne doit pas demander de pousser les animaux.
Des éléments de vigilance pour soulager physiquement
Certains éléments paraissent parfois anecdotiques, mais peuvent s’avérer être une source de pénibilité lorsqu’ils se répètent « trop ».
Quelques éléments de vigilance :
- Eviter des déplacements permanents pour l’éleveur, ne pas avoir à pousser les animaux…, l’agencement des équipements doit favoriser l’avancée régulière les animaux vers le poste de travail (voir fiche 5)
- Eviter des postures sollicitantes surtout au niveau du dos :
- Accéder à la brebis sans se baisser, en créant un poste en hauteur pour les interventions à la tête et à l’arrière (voir « Combi Clamp® »), ou en surélevant le couloir de 10-15cm, ou en laissant un espace suffisant pour passer les pieds sous les parois du couloir ce qui permet d’appuyer les jambes sur ces parois et ainsi soulager un peu le dos quand on se baisse par-dessus le couloir, ou en installant une porte se repliant sur le couloir (porte accordéon) pour accéder à l’arrière de la brebis .
- Chercher à avoir une posture sans torsion du tronc, la posture variera selon les interventions par exemple on se positionnera perpendiculairement au couloir pour effectuer un traitement buccal, ou parallèlement au couloir pour trier.
- Chercher à pouvoir intervenir en ayant un geste « le plus naturel possible ». Par exemple, veiller à l’agencement des équipements pour que l’éleveur, droitier ou gaucher puisse travailler facilement et sans posture sollicitante, ce qui peut influer sur la position de l’aire de l’éleveur, sur le système de retournement pour la taille des onglons... Mais il peut y avoir plusieurs utilisateurs, donc potentiellement droitiers et gauchers, il est intéressant de prévoir de pouvoir circuler et avoir des accès à la brebis des 2 côtés du couloir
2 - Faire le point sur ses besoins pour définir son projet
Pour concevoir ses futures situations de travail, il est important de partir de ses besoins, sans en oublier, sans en surestimer ou sous-estimer.
Quelles interventions à réaliser ? Sur quels animaux ?
Nous vous proposons un tableau pour lister les interventions à réaliser, sur quels animaux et où
[Télécharger le tableau sous format PDF]
L’ensemble de ces éléments vont vous orienter sur les pistes suivantes :
- Un parc de contention fixe ou/et mobile
- Un parc spécialisé pour les agneaux
- Quels équipements ?
Des points restent à réfléchir :
- Quelles interventions je ne fais pas actuellement, mais qui pourraient être nécessaires voire un jour indispensables ? Si tel était le cas, faut-il les prévoir où est ce que je trouverai une autre solution ?
- Pour les troupeaux à plus petit effectif (<150 brebis, <200 brebis ?), un parc de contention fixe simplifié est envisageable. Un équipement est indispensable quelle que soit l’effectif pour travailler confortablement, à défaut les ovins demandant beaucoup d’interventions soit on s’épuise soit on arrête la production
- Pour les parcs mobiles, est-il possible d’envisager une acquisition collective ?
3 - Organiser des échanges sur son projet |
---|
Un projet de parc de contention peut sembler complexe. Il est important de s’entourer pour mûrir sa réflexion avec des personnes qui ont des expériences de conception et/ou d’utilisation : les conseillers et techniciens, les fermes expérimentales ovines, des éleveurs équipés.
Une veille sur les innovations, qu’il s’agisse d’équipements ou d’agencement, peut permettre de mieux répondre à ses propres besoins, dans tous les cas cette démarche est toujours source d’idées nouvelles pour concevoir son projet.
Des visites en cours d’utilisation sont idéales, elles permettent de voir « pour de vrai » ce qui fonctionne bien et moins bien, elles permettent d’échanger avec les utilisateurs, on peut même parfois essayer… En cas d’innovations, citons par exemple Combi Clamp® qui facilite la circulation, permet de positionner l’animal en hauteur, mais l’essayer « en situation réelle » va permettre à chacun de voir s’il est à l’aise (au niveau de la posture et des gestes d’intervention).
Construire son projet est une réponse à la fois à ses besoins et doit permettre à l’éleveur d’être à l’aise dans ses futurs gestes. A chaque éleveur, à chaque élevage sa solution !
4 - Décider pour allier santé et résultats technico-économiques |
---|
Les aspects économiques doivent être pris en compte, mais sans les surestimer ou en faire la seule priorité. Ils sont toujours à mettre en balance avec les aspects travail. Un éleveur en bonne santé physique et qui prend du plaisir à réaliser son travail est ce qui a le plus de valeur et c’est aussi la condition incontournable pour qu’il mette en œuvre les pratiques nécessaires au bon fonctionnement de l’élevage.
De plus, le coût global de l’investissement doit être analysé comme tout investissement, en déduisant les aides possibles, puis en prenant en compte le coût annuel d’amortissement.
De la décision prise dépendront la qualité du travail réalisé sur les animaux et les futures conditions de travail (physiques et subjectives).