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Programme de contrôle des comptages de cellules somatiques (CCS) de troupeaux

Mise au point, application et évaluation de stratégies de contrôle des CCS en élevage caprin

Publié le par Renée de Crémoux (Institut de l'Elevage)
Qualité des produits laitiers Santé Traite Caprin
L'amélioration de la qualité du lait et des produits laitiers est une des priorités de la filière caprine. En particulier, les concentrations cellulaires sont prises en compte pour apprécier le statut sanitaire des troupeaux vis-à-vis des infections mammaires. Une étude a donc été conduite afin d'élaborer une méthodologie de diagnostic et de conseil visant à la maîtrise progressive des infections mammaires et de mesurer l'efficacité technique et la faisabilité de cette démarche.

Cinquante et un élevages des régions Centre, Pays de la Loire et Poitou-Charentes, adhérents au Contrôle Laitier ont été suivis pendant 2 ans. Ils ont été recrutés en fonction de leurs concentrations cellulaires de laits de tanks obtenues au cours des précédentes campagnes laitières : au moins 6 mesures de comptages de cellules somatiques (CCS) supérieures à un million de cellules par ml dont au moins 2 supérieures à 1 500 000 cellules par ml. Les pratiques d’élevage ont été enregistrées et les résultats de concentrations cellulaires individuelles et de troupeau ont été analysés. Les résultats individuels ont notamment permis d’estimer le statut infectieux des chèvres et de dresser le bilan de la période sèche : calculs d’indicateurs pour évaluer les taux de guérisons ou nouvelles infections.

            

Au cours du suivi, une évolution des pratiques

L’adoption de mesures préventives a concerné un nombre croissant d’exploitations : 66,7 % et 78,4 % des élevages au cours de la première puis de la seconde année de suivi contre 49 % lors de l’année de référence.

L’instauration d’un ordre de traite a ainsi été effectuée dans près de 67 % des exploitations. Délicate à maîtriser, la technique de traite a toutefois fait l’objet d’une attention croissante.

               

En ce qui concerne les mesures curatives, le traitement antibiotique au tarissement a été bien accepté : 83,7 % de traitements généralisés et 12,2 % de traitements sélectifs sur moins de 60 % du cheptel. En revanche, les éleveurs sont restés réticents à réformer sur des critères de santé mammaire.

         

Incidence des mesures de maîtrise

            

Gestion de la reproduction

Les résultats obtenus font apparaître l’importance de la gestion de la reproduction. Le désaisonnement associé à l’étalement des mises bas et à l’allongement des lactations paraît propice au maintien de la pression d’infection qui pourrait être à l’origine de réinfections précoces en début de lactation.

             

Antibiothérapie au tarissement

Lors d’application d’une antibiothérapie systématique au tarissement, les taux de guérisons ont varié de 55,7 à 73,4 % en fonction de l’origine des infections (contre seulement 38,6 à 62,1 % en l’absence de traitement ou lorsque moins de 30 % du cheptel est traité), et la réduction des nouvelles infections a été estimée à environ 20 %.

             

Pratiques de traite

  • L’instauration d’un ordre de traite reste une piste intéressante pour diminuer la fréquence des infections présumées.

         

Phase de massage
au cours de la traite

Crédit photo : R. de Cremoux

 
  • L’impact de la surtraite, de même que celui de la désinfection des trayons après la traite dépendent du niveau d’infection présent dans l’exploitation. La surtraite semble avoir peu de conséquences dans un contexte de prévalence faible à modérée (on peut parler d’une relative tolérance des chèvres à la surtraite). La désinfection des trayons après la traite s’est avérée plus efficace en début de lactation, et dans un contexte de faible prévalence.
 

 

  • Les autres pratiques de traite interviennent à des degrés divers dans la maîtrise des concentrations cellulaires individuelles et sont difficiles à hiérarchiser.
    La réduction des entrées d’air dans l’installation de traite est associée à une amélioration significative de la situation sanitaire du troupeau (risque relatif proche de 0,92 vis-à-vis des infections présumées à pathogènes mineurs).
    Le massage, l’égouttage et la repasse affectent plus particulièrement les primipares (risques relatifs de 0,602 à 0,818 selon le type d’infection présumée considérée).
      
  • L’effet de la machine à traire (conception, réglages, …) n’a pas pu être mesuré. Il doit faire l’objet de travaux spécifiques prenant en compte l’existence de l’interaction entre le trayeur, sa technique, et l’installation de traite.
 

 

Perspectives

 

Cette étude a fait apparaître la nécessité d’adapter et de hiérarchiser les conseils à la situation sanitaire et aux conduites d’élevage des troupeaux. Pour ce faire, il est impératif de s’appuyer sur des indicateurs fiables. Ceux-ci peuvent être obtenus à deux niveaux :à l’échelle du troupeau, par l’intermédiaire des concentrations cellulaires de laits de tanks ; à l’échelle individuelle 

  •  Les résultats individuels doivent permettre, au-delà des suivis individuels, de définir des critères synthétiques pour décrire la situation sanitaire de l’élevage et orienter le conseil ;

   

  • L’état des trayons et des mamelles est un élément à prendre en considération dans le diagnostic, la décision et le conseil. La décision de réforme devrait s’appuyer sur l’enregistrement des anomalies de la mamelle aussi bien que sur l’historique des infections cliniques et subcliniques. Les lésions des trayons sont aussi les témoins d’un dysfonctionnement de la traite au sens large (lié à l’installation et/ou aux pratiques de traite) susceptibles d’interpeller l’éleveur ou le technicien.

        

Des études doivent encore être poursuivies pour améliorer la recherche des facteurs de risque et ajuster les plans d’intervention notamment dans le domaine de la traite.

Plusieurs domaines doivent être explorés :qualification des lésions des trayons, incidence précise sur l’accroissement des risques d’infection, détermination et hiérarchisation des pratiques ou réglages à risque, relation entre les lésions palpables et les séquelles des infections sur le parenchyme mammaire, détermination de l’origine des indurations (bactérienne vs virale) en fonction de leur localisation et de leurs caractéristiques,…

Autant d’éléments qui méritent une investigation à court ou moyen terme avec l’objectif de répondre aux attentes concrètes des producteurs face à des exigences toujours croissantes de la part des entreprises laitières comme des consommateurs.

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