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Interactions hôte-microbiote : des différences de microbiote fécal associées aux performances laitières chez la Holstein

Publié le par Louise Brulin (Genes Diffusion), Pascal Croiseau (INRAE), Marie-Pierre Sanchez (INRAE), Jordi Estelle-Fabrellas (INRAE)
Génomique Performances et phénotypes Ressources génétiques Bovin lait
Le lien entre la composition du microbiote et les performances des vaches laitières est peu connu. Cette étude montre que la composition du microbiote et sa diversité influencent les performances des vaches laitières. Le genre Bifidobacterium semble particulièrement associé aux caractères de production.

 

Les ruminants et la relation qu’ils entretiennent avec le microbiote de leur tractus gastro-intestinal représentent un très bon exemple des symbioses pouvant exister entre un hôte et son microbiote. Cependant, la composition du microbiote fécal de la vache laitière et ses interactions avec son hôte sont encore peu décrites. Une collaboration entre Gènes Diffusion et INRAE a permis de caractériser finement la population de micro-organismes présents dans le tractus intestinal de 600 vaches Holstein et d’évaluer le lien entre la composition du microbiote et les performances laitières de ces animaux.

 

Une diversité microbienne liée aux performances

La diversité des micro-organismes au sein d’un microbiote peut être évaluée grâce à deux indices, l’α-diversité et la β-diversité. Dans cette étude, ils sont estimés par l’Index de Shannon et l’indice de dissimilarité de Bray-Curtis, qui mesurent respectivement la diversité intra-individuelle et inter-individuelle au sein d’une population (Figure 1).

 

Figure 1 : Définitions des indices de α-diversité (gauche) et β-diversité (droite) du microbiote

 

Les résultats ont mis en relief des corrélations négatives entre l’Index de Shannon et la production laitière des vaches, révélant ainsi une plus grande diversité du microbiote intestinal chez les vaches présentant les plus faibles niveaux de production. Par ailleurs, les résultats significatifs des tests d’association entre la distance de Bray-Curtis et les performances ont mis en évidence des différences de structure entre le microbiote de vaches à haute production et celui des vaches à plus faible production.

 

Certains genres de bactéries ont une association plus importante que d’autres

Afin de mettre en lumière les genres bactériens dont l’abondance varie en fonction de la production laitière, des analyses d’abondances différentielles ont été menées. Parmi les différents genres associés à la production, Bifidobacterium est celui dont l’abondance augmente le plus par unité de production laitière, matière grasse et matière protéique. Le microbiote fécal des vaches avec de hauts niveaux de production est donc significativement enrichi avec Bifidobacterium. Bien décrit dans la littérature scientifique, ce genre bactérien commensal du tractus gastro-intestinal des mammifères joue un rôle clé dans de nombreux mécanismes, notamment la dégradation des glucides complexes (Figure 2).

 

Figure 2 : Rôles principaux du genre Bifidobacterium dans l'intestin de la vache laitière

 

Par ailleurs, des analyses approfondies au niveau de l’espèce ont permis de mettre en évidence une souche de Bifidobacterium, particulièrement proche de B. globosum et B. pseudolongum, comme la plus associée aux caractères de production. Communément observées dans les intestins des ruminants, ces deux espèces se sont adaptées et spécialisées dans la digestion des glucides les plus complexes qui parviennent à traverser le rumen (Lugli et al., 2019). Cette caractéristique corrobore notre hypothèse selon laquelle cette souche de Bifidobacterium est un auxiliaire de production qui aide à une meilleure valorisation des glucides de la ration, ce qui permettrait une amélioration des performances laitières de l’hôte.

 

Perspectives

Cette première étude démontre l’importance de l’interaction entre le microbiote fécal des vaches et leurs performances laitières. D’autres analyses impliquant la génétique de l’hôte sont en cours dans le but de mieux comprendre la relation hôte-microbiote ainsi que les leviers disponibles pour influencer la composition du microbiote.

 

Pour aller plus loin :

Les résultats de cette étude ont été soumis à publication dans un journal à comité de lecture.

Cette étude a été réalisée dans le cadre de la thèse CIFRE (CIFRE n°2021/0713) de Louise Brulin, co-financée par Gènes Diffusion et l’Agence Nationale de la Recherche et de la Technologie (ANRT).

 

Référence bibliographique

Lugli GA, Duranti S, Albert K, Mancabelli L, Napoli S, Viappiani A, Anzalone R, Longhi G, Milani C, Turroni F, Alessandri G, Sela DA, van Sinderen D and Ventura M 2019. Unveiling Genomic Diversity among Members of the Species Bifidobacterium pseudolongum, a Widely Distributed Gut Commensal of the Animal Kingdom. Applied and Environmental Microbiology 85, e03065-18.