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Peut-on monitorer le comportement d’abreuvement grâce à l’identification électronique UHF ?

POC sur agneaux en bâtiment à la digiferme du Mourier, mai 2021

Publié le par Blandine Fagot (Institut de l'Elevage), Sébastien Duroy (Institut de l'Elevage), Denis Gautier (Institut de l'Elevage), Cécile Valadier
Les essais de la technologie UHF se poursuivent, avec un nouveau cas d'usage : monitorer le comportement d'abreuvement des agneaux en bergerie, dans le but de détecter précocement des problèmes de bien-être animal.

L’identification électronique Ultra Haute Fréquence (RFID UHF) a déjà fait ses preuves et montré son intérêt pour détecter des animaux, en groupe et à plusieurs mètres de distance, cf essai ‘Lots en mouvement’.  

Cette technologie peut-elle aussi être utilisée dans un autre cas d’usage : à courte distance, pour monitorer finement le comportement d’abreuvement de chaque animal ? Pour quelles applications ?

L’objectif final de cet essai est d’avoir un système capable de monitorer la fréquentation de l’abreuvoir et de voir si un problème de bien-être des petits ruminants se traduirait par une modification du comportement d’abreuvement, détectable grâce à ce dispositif.

Les animaux

L’essai a été réalisé sur 30 agneaux de 45-60 jours dans un parc de 30 m² avec un abreuvoir à pipette. Chaque agneau a été équipé d’une boucle électronique UHF, en plus de la boucle électronique officielle basse fréquence.

Le matériel

La valise et l’antenne ont été fixées au-dessus de l’abreuvoir. Une application permet de télécharger les données en se connectant en Bluetooth à la valise. Cette application a été éditée par Page Up, éditeur et intégrateur de solutions mobiles.

 

Observations

L’enregistrement des données s’est fait en continu pendant 4 semaines, 24/7.

En parallèle, plusieurs sessions d’observation ont permis de vérifier la cohérence des données enregistrées par rapport aux comportements observés.

Enseignements

L’installation du matériel est très facile : en une demi-journée, tous les agneaux étaient bouclés et le matériel était installé, fonctionnel. La distance modulable de l’UHF permet de s’affranchir des contraintes de contention et des équipements encombrants nécessaires quand on utilise de la basse fréquence.

Le monitorage a bien fonctionné, en continu pendant 4 semaines, 24h sur 24, ce qui nous permet d’avoir de bonnes références sur la fréquentation du point d’abreuvement, en termes d’horaires, de fréquence, et de durée des visites.

Le système a bien détecté tous les animaux qui se sont présentés à l’abreuvoir, les 30 agneaux ont été détectés tous les jours, plusieurs fois par jour, et de manière conforme aux déplacements relevés pendant les séances d’observation.

L’antenne détecte correctement la boucle, quelle que soit sa position sur l’animal (sur l’oreille gauche/droite, sur l’avant ou l’arrière de l’oreille). Cela confirme qu’il n’y a pas d’interférence observable avec la boucle basse fréquence.

 

Qu’a-t-on observé sur les habitudes d’abreuvement des agneaux?

  • Les horaires de fréquentation de l’abreuvoir
    la courbe journalière d’affluence à l’abreuvoir montre une forte activité à partir de 6h, avec le lever du jour, une baisse d’affluence vers midi, puis un deuxième pic vers 19-20h avant un retour au calme pour la nuit, entre 22h et 6h.
  • L’évolution journalière de la fréquentation de l’abreuvoir
    on observe des affluences différentes en fonction des jours, dépendant essentiellement de la température, de l’hygrométrie, mais aussi de la propreté des abreuvoirs.
     

    <--- Le 3 mai et le 13 mai on observe un pic d’affluence dans l’heure qui suit le nettoyage des abreuvoirs

Forte corrélation entre 
la durée cumulée par jour à l’abreuvoir
et la température max de la journée (0,73) :

  • Variabilité entre agneaux
    Des profils de comportement très différents semblent se dégager :
    Les discrets (6 agneaux) : passent entre 4 et 10 minutes par jour à l’abreuvoir, avec moins de 10 visites par jour.
    Les intermédiaires (19 agneaux) : passent entre 10 et 30 minutes à l’abreuvoir, entre 10 et 20 fois par jour.
    Les gros buveurs (5 agneaux) : passent entre 25 et 45 minutes par jour à l’abreuvoir, en se présentant plus de 25 fois par jour à l’abreuvoir
    Sur les deux derniers groupes, une analyse de la force du signal permettrait d’affiner ces données.
     
  • Variabilité par agneau
    des profils se dégagent mais le nombre de passages et la durée des passages restent très variables d’un jour à l’autre pour un même agneau. Pour comprendre les comportements et apprécier le seuil d’alerte à fixer il faudrait prendre en compte des facteurs tels que la température, l’humidité, le type d’aliment (plus ou moins sec), et tous les autres paramètres qui peuvent influencer le comportement d’abreuvement qui ne seraient pas liés à un problème de santé ou de bien-être.

Pour aller plus loin

L’analyse des données récoltées doit être approfondie pour obtenir des données affinées, capables de produire un système d’alerte précoce de problème de bien-être. Il y a notamment un biais sur les animaux qui se couchent en-dessous de l’abreuvoir, qui sont détectés plusieurs fois de suite sur de longues périodes. Le temps d’abreuvement maximum observé est de 2 minutes, la durée des visites plus longues a été ramenée à 2 minutes. Les observations montrent également que les visites de moins de 10 secondes ne peuvent pas être considérées comme des visites d’abreuvement et ont été supprimées.

Les règles de filtrage des données sont à améliorer pour correspondre toujours plus aux observations.

La RFID UHF permet notamment de connaitre la puissance du signal, information importante qui donne une idée de la distance entre l’animal et l’antenne, cette information doit être valorisée pour affiner les règles de filtrage. Cela permettrait probablement de distinguer les animaux qui s’abreuvent des animaux qui sont couchés sous l’abreuvoir.

Ce premier essai a permis de confirmer l’intérêt du système et d’obtenir des premières références sur l’abreuvement des agneaux. En répétant des expériences de ce type les résultats pourront être affinés en filtrant davantage les données incohérentes.

Il est envisagé d’utiliser ce dispositif sur d’autres zones d’intérêt (râtelier, auge, brosse, etc.) pour monitorer plus finement le comportement des animaux et obtenir des alertes précoces de problèmes de bien-être.