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Statistiques des inséminations sur femelles laitières 2020 : le croisement laitier

Bilan des inséminations animales bovines 2020

Publié le par Sandra Dominique (Institut de l'Elevage)
Les inséminations animales sur femelles laitières en croisement laitier sont stables depuis 2018. Elles représentent 6% des 3 143 750 inséminations premières réalisées sur femelles laitières en 2020. Retrouvez dans cet article, et son document associé en fin de page, les statistiques nationales des inséminations en croisement laitier sur femelles laitières.

Quelle place occupe les inséminations en croisement laitier en 2020 ?

Des 53 486 élevages ayant réalisés au moins une IAP sur femelle laitière, 23 327 élevages ont au moins fait une insémination en croisement laitier, soit 44% d’entre eux.

Sur l’intégralité des 3 143 750 IAP sur femelles laitières, 189 678 IAP sont réalisées avec un taureau de races laitières différentes, soit 6% des inséminations premières.

Sur l’ensemble des inséminations totales, la proportion d’IAT en croisement laitier est de 5,3%.

Le tableau suivant présente la place qu’occupent les inséminations premières en croisement laitier pour chaque race de femelle.

 

Nombre d’IAP et proportion en croisement lait en 2020 et 2019 par race de femelle

 

Races de femelles

IAP totales

% IAP croisées lait

% IAP croisées lait en 2019 (N-1)

Abondance

12

31 673

1%

1%

Autres races traites étrangères

44

280

64%

63%

Ayrshire

18

122

48%

55%

Bleue du Nord

52

627

8%

6%

Bordelaise

26

51

4%

4%

Bretonne pie-noir

29

796

2%

1%

Brune

21

22 117

3%

3%

Buffle

20

15

0%

0%

Canadienne

92

15

0%

0%

Croisé

39

161 129

78%

80%

Ferrandaise

65

551

1%

2%

Froment du Léon

69

125

3%

1%

Jersiaise

15

17 822

2%

2%

Montbéliarde

46

539 975

2%

2%

Normande

56

240 217

2%

2%

Pie-rouge

19

13 452

18%

17%

Prim'holstein

66

2 079 171

2%

2%

Rouge flamande

63

1 144

9%

11%

Simmental française

35

21 709

2%

2%

Tarentaise

31

9 539

1%

1%

Villard de Lans

53

95

3%

1%

Vosgienne

57

3 125

2%

2%

France

3 143 750

6%

6%

Parmi les races réalisant plus de 1 000 IAP, on peut notamment noter la forte proportion d’IAP croisées lait chez les femelles Pie-rouge ou Rouge Flamande avec respectivement 17% et 11% de leurs IAP réalisées avec un taureau d’une autre race laitière.

Chez les 3 grandes races Prim’Holstein, Montbéliarde et Normande, le croisement laitier dès la première insémination correspond pour chacune à 2%. C’est une pratique minoritaire.

En parlant de croisement laitier, des races sont souvent évoquées comme la Brune ou la Jersiaise. Avec respectivement 2% et 3% de leurs inséminations premières en croisement laitier, on constate que les femelles de ces races ne sont pas plus inséminées en croisement que les trois grandes races par exemple.

Quelles sont les races de femelles les plus croisées avec un taureau laitier d’une autre race ? 

D’après le graphique ci-dessus, les inséminations premières en croisement laitier sont majoritairement réalisées sur des femelles croisées (code race=39). En 2020, la somme des IAP sur femelles croisées de première génération (F1) et les femelles croisées F2 (2 générations) et plus, représente 67% des IAP sur femelles laitières inséminées en croisement laitier. 24% des IAP croisées lait sont réalisées sur des femelles Prim’Holstein, 5% sur des femelles Montbéliarde, 2% de Normande, 1% de Pie-Rouge et 1% d’autres races.

D’un point de vue général, les IAP croisées lait ont connu une belle augmentation entre 2010 et 2014 (+ 40 000 IAP) expliquée notamment par le nombre croissant d’IAP réalisées sur des femelles croisées. A partir de 2014 on observe un plateau où le nombre d’IAP est stable jusqu’en 2016 (160 000 IAP croisées lait par an). En 2017 le croisement laitier connait un rebond notamment dû aux IAP sur femelles Prim’Holstein pour finalement se stabiliser entre 187 000 et 190 000 IAP par an jusqu’en 2020.

Le nombre de femelles croisées (F1 et F2 et +) inséminées en croisement laitier à augmenter de 80 000 à 126 500 entre 2010 et 2020 (+56%). Leur nombre est stable entre 2017 et 2019. On note une légère augmentation en 2020. Selon les années la proportion de ces femelles parmi toutes les races inséminées en croisement laitier est comprise entre 65% et 71%. Depuis 2017, on note une légère augmentation (+2%) de la proportion de femelles croisées F2 et + tandis que la proportion de F1 inséminées stagnent à 47%.

Depuis 2018 on note peu d’évolution. Le nombre d’IAP croisées lait a augmenté seulement de 1% (+2 500 IAP environ) entre 2018 et aujourd’hui.

Cette stabilisation est-elle une tendance qui va se maintenir ? Ou est-ce que les IAP croisées lait connaitront un nouveau rebond?

Quelle utilisation de la semence sexée chez les IAP croisées lait ?

Nombre et proportion des IAP sexées en fonction du type d'insémination (race pure/croisement laitier) en 2020

 

Semence sexée

IAP race pure sexées

IAP croisées lait sexées

Génisses

Nombre

247 532

12 617

% IAP

32%

27%

Vaches

Nombre

134 851

11 401

% IAP

8%

8%

Si l’on compare l’activité des inséminations premières sexées entre des IA de race pure et des IA croisées lait sur femelles laitières, on constate que sur vaches il n’y a pas de différence. Que ce soit sur l’ensemble des IAP race pure ou sur les IAP croisées lait, 8% des IAP sont sexées.

Chez les génisses, les IAP croisées lait sont moins propices à être sexées que les IAP en race pure. La proportion reste élevée avec 27% des IAP croisées lait sexées, mais cela représente 5% des moins que l’équivalent sur les IAP en race pure.

L’un des objectifs de l’utilisation de la semence sexée étant de choisir les mères supports du futur renouvellement, on peut émettre l’hypothèse que l’absence d’évaluation génétique disponible pour les animaux croisées amène les éleveurs à ne pas forcément choisir leur renouvellement sur les veaux issus des primipares mais qu’ils préfèrent attendre une première performance de lactation pour déterminer quelles seront les vaches à utiliser comme mères des futures génisses de renouvellement.

Quelle est l’utilisation des taureaux laitiers dans le croisement ? 

D’après le graphique ci-dessus, les différentes races de taureaux laitiers ne sont pas toutes utilisées avec la même intensité en croisement. En 2020, entre 34% et 37% des IAP de taureaux de races Jersiaise, Brune et Simmental sont réalisées sur des femelles d’autres races laitières.

La race Jersiaise est intéressante en croisement laitier car elle apporte notamment des taux au lait, de la rusticité et un gabarit plus petit. La race Brune permet de garantir un bon niveau de production tout en augmentant la matière utile dans le lait et les caractères fonctionnels. La race Normande est appréciée pour sa mixité avec du gabarit et une aptitude au pâturage avec de bons pieds. La Simmental apporte aussi cette part de mixité avec un atout notamment sur les caractères fonctionnels et les caractères de reproduction. La race Montbéliarde et la Rouge Scandinave sont deux races qui ont déjà fait leur preuve en croisement (Procross). Elles apportent des taux, de la santé et de la fertilité.

Le dossier sur le croisement laitier expose différents résultats d’études et les atouts à la pratique du croisement laitier.

On constate que malgré peu d’IAP réalisées (< 20 000), les taureaux Pie Rouge réalisent plus de la moitié de leurs inséminations en croisement laitier. L’activité en croisement chez cette race est à la fois forte chez les femelles mais aussi chez les taureaux.

L’utilisation des taureaux Rouge Scandinave est pratiquement exclusive sur des femelles d’autres races laitières. En effet, l’effectif de femelles en France de cette race est assez faible avec juste 280 femelles inséminées.

Quelle est l’évolution depuis 10 ans de la pratique du croisement laitier par race de taureau ? 

On observe une évolution de la proportion de chaque race de taureau dans le volume d’IAP croisées lait au cours des années. En 2010, 80% des IAP croisées lait étaient réalisées par des taureaux de l’une des trois grandes races : Prim’Holstein (50%), Montbéliarde (20%) ou Normande (11%).

Jusqu’en 2015, c’est l’augmentation du nombre d’IAP réalisées par des taureaux de race Prim’Holstein qui explique l’évolution croissante du croisement laitier. La part des IAP par des taureaux Normand ou Montbéliard diminue et le volume d’IAP réalisées par l’ensemble des autres races reste constant entre 18% et 19%.

A partir de 2015, la courbe du nombre d’IAP croisées lait des taureaux Prim’Holstein s’inverse. Entre 2015 et 2020, c’est environ 13 500 IAP en moins réalisées par cette race de taureaux. Mais le nombre total d’IAP croisées lait total continue de croitre, notamment entre 2016 et 2017 grâce à l’augmentation des IAP par d’autres races comme la Jersiaise et Rouge Scandinave.

La perte de 10% de l’activité globale du croisement lait par les taureaux Prim’Holstein entre 2010 et 2020 est surtout expliquée par le développement en croisement d’autres races de taureau.

Si en 2015, 21% des IAP croisées étaient réalisées par une autre race de taureau que Prim’Holstein, Normande ou Montbéliarde, en 2020 c’est bien 31% de l’activité IAP croisement laitier qui est réalisée par les races de taureaux Brune, Jersiaise, Simmental, Pie Rouge, Rouge Scandinave, … Le développement de l’utilisation de ces races est indéniable et correspond au taux de baisse de la proportion d’IAP croisées lait réalisées par les taureaux Prim’Holstein.

Si le nombre d’IAP croisées lait est stable depuis 3 ans, les taureaux Prim’Holstein continuent de perdre en nombre d’IAP au profit des plus petites races.

Le top 5 des taureaux utilisés en croisement laitier

Les taureaux de race Prim’Holstein restent tout de même les taureaux les plus utilisées en croisement lait (40% des IAP croisées lait). Parmi les 5 taureaux de cette race réalisant le plus d’IAP en croisement laitier, 4 d’entre eux sont des taureaux Prim’Holstein Red. Le cinquième taureau est aussi le plus populaire dans les IAP race pure : NANTAIS.

Les profils des taureaux Prim’Holsetin Red utilisés en croisement sont des taureaux notamment améliorateurs sur les taux et les caractères de reproduction (fertilité). Certains apportent du lait tout comme des membres adaptés au pâturage.

Quels sont les croisements entre races les plus courants ?

Le graphique ci-dessus expose la grande diversité de croisements réalisés dans les élevages laitiers en première insémination. Le croisement entre femelles croisées et taureaux Prim’Holstein est le plus populaire. Les taureaux Montbéliard connaissent aussi une grande popularité. Mais on note que 40% des IAP croisées laits sont réalisées sous diverses races supports.

Ce graphique permet de visualiser quelle race de femelle est associée à quelle race de taureaux en première insémination. On constate que plus de la moitié des inséminations croisées sur femelles croisées, Montbéliarde et Normande sont réalisées avec des taureaux Prim’Holstein. La proportion de femelles inséminées avec un taureau Prim’Holstein est de 60% chez les femelles Brune et plus de 85% chez les femelles Pie-Rouge.

Plus d’un tiers des femelles Prim’Holstein avec une IAP croisées lait le sont avec des taureaux Montbéliard. Les taureaux Simmental sont assez populaires chez les femelles Montbéliarde. Cela est surement dû à une pratique territoriale avec deux races principalement présentes dans l’Est de la France. Tout comme le croisement de femelles Montbéliarde avec un taureau Vosgien, connu pour apporter de la fertilité. Plus de 43% des IA de retour en croisement laitier chez les femelles Montbéliarde sont réalisées avec un taureau Vosgien.

Les taureaux Jersiais sont utilisés notamment sur des femelles Prim’Holstein et Brune. Les taureaux Pie-rouge sont appréciés sur les femelles Prim’Holstein et Normande. La plus grande diversité de taureaux utilisés se trouve chez les femelles de race Prim’Holstein. C’est attendu car c’est la race la plus présente en France et avec des performances en production importante. Elle est un support intéressant pour valoriser à la fois de la quantité et de la qualité de lait en l’associant avec une autre race de taureau.

Où sont réalisées les inséminations croisées lait ?

D’après la carte ci-dessus on constate, qu’en nombre (histogrammes jaune), les IAP croisées lait sont principalement réalisées dans les élevages du Nord-Ouest et notamment dans les régions de Normandie et Bretagne. Ce sont la Manche et l’Ille-et-Vilaine les départements réalisant le plus grand nombre d’IAP croisées lait. En proportion (dégradé vert), ce sont les régions de Normandie et du Nord-Pas-de-Calais-Picardie qui réalisent la plus grande part de leurs IAP en croisement lait (entre 9% et 17%) par rapport à l’ensemble des IAP sur femelles laitières de ces régions.

Le croisement laitier : IA première ou IA de retour ? 

En 2020, on dénombre environ 363 000 inséminations totales sur femelles laitières en croisement lait dont un peu moins de 190 000 inséminations premières (52%). Ainsi, l’activité de croisement laitier se partage de moitié entre des inséminations premières, choisies dans une stratégie d’éleveurs, et des inséminations de retour après un échec d’IA.

Parmi les femelles initialement inséminées en race pure pour leur première IA, peu d'entre elles sont par la suite inséminées en croisement laiier. La proportion de retour en croisement laitier varie entre 0,2% et 2% selon les rangs d'IA. Respectivement sur génisses et vaches c’est à partir de la cinquième et de la quatrième insémination successive que les femelles inséminées initialement en race pure sont timidement inséminées avec des taureaux laitiers de races différentes.

Les inséminations de rang n°2 croisées lait ont été précédées à 85% par des IAP croisées lait et à 10% par des IAP race pure. Le croisement laitier s’inscrit donc en très grande majorité dans des stratégies d’éleveurs. C’est une pratique que très peu utilise en cas d’échec d’insémination où le croisement avec un taureau allaitant sera privilégié.

Quels sont les élevages qui pratiquent le croisement laitier ?

En lien avec la baisse général du nombre d’élevages et de vaches en France, le nombre de troupeaux où des femelles laitières sont inséminées baisse depuis plusieurs années. Entre 2010 et 2020, ce sont 34% de troupeaux laitiers en moins qui ont réalisé au moins une insémination sur femelle laitière. Le nombre d’élevages réalisant au moins une insémination en croisement laitier baisse moins vite : -14% entre 2010 et 2020, et donc leur proportion sur le nombre total d’élevages augmente, passant de 33% en 2010 à 43% en 2020.

Entre 2019 et 2020, ce sont 1 103 nouveaux élevages qui ont réalisé au moins une IAP croisée lait sur femelle laitière. Mais seulement 40 d’entre eux ont fait au moins 10 IAP croisées lait.

D’après ce graphique, on constate que plus la taille de l’élevage augmente en nombre d’IAP, plus la proportion d’élevages réalisant au moins une IAP croisée lait augmente. 71% des très grands élevages laitiers (>=200 IAP) ont réalisé au moins une IAP croisée lait. A noter toutefois que le nombre moyen d’IAP croisées lait par cheptel n’est que de 16,6 IAP pour cette même classe de taille. Le croisement laitier peut être intéressant dans des grands troupeaux basés initialement sur des races très productives (ex : Prim’Holstein) afin d’apporter une amélioration de caractères fonctionnels notamment. Le croisement laitier, par l’effet d’hétérosis, permet une amélioration des caractères peu héritables tels que la fertilité ou les caractères liés à la santé, faisant défaut aux races productives.

Le croisement laitier peut être envisagé comme un levier au maintien d’un volume de production correct avec des animaux qui présentent des caractères fonctionnels améliorés.