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Influence des infections d'origine bactérienne sur les concentrations cellulaires

Publié le par Renée de Crémoux (Institut de l'Elevage)
Les mammites cliniques et subcliniques sont majoritairement d'origine bactérienne. Face à ces infections, la mamelle va mettre en place un ensemble de défenses. Des cellules, les polynucléaires, vont ainsi être recrutés afin de phagocyter les bactéries qui auront pu pénétrer dans la mamelle et s'y multiplier.

De nombreux travaux ont été conduits pour évaluer l'incidence des infections sur les concentrations cellulaires.

Les résultats présentés ici proviennent de travaux conduits dans 8 exploitations de la région Poitou-Charentes. Environ 1060 chèvres ont été suivies sur l'ensemble de leur lactation.

53 % des mamelles étaient saines (deux demi-mamelles saines), 44,7 % étaient infectées par des staphylocoques coagulase négative (une ou deux demi-mamelles infectées par un pathogène mineur) et 2,3 % étaient infectés par des pathogènes majeurs (une ou deux demi-mamelles infectées par ce type de bactéries).

      

Des concentrations cellulaires plus élevées en cas d'infection

 

On observe que la moyenne des concentrations cellulaires observées est :

  • de 493 000 cellules par ml pour les mamelles saines,
  • d'environ un million de cellules pour les mamelles infectées par des staphylocoques coagulase négative,
  • de plus de 2 millions de cellules pour les mamelles infectées par des pathogènes majeurs.

    

Incidence du statut infectieux sur les concentrations cellulaires individuelles

 

 Qu'en est -il sur le plan cinétique? tout au long de la lactation ?

Évolution moyenne des concentrations cellulaires du lait chez les chèvres
selon le statut infectieux de leur mamelle

 

    

Sur l'ensemble de la lactation, on constate une augmentation constante des concentrations cellulaires (effet du stade de lactation).

 

Cependant, les concentrations cellulaires sont en moyenne toujours significativement plus élevées en cas d'infection. Les infections occasionnées par des pathogènes majeurs suscitent des réactions cellulaires particulièrement importantes : valeurs régulièrement supérieures à 2 millions de cellules par ml.

      

Au-delà des moyennes...

 

Si l’on reprend les résultats obtenus tout au long de la lactation des 1060 chèvres de l’étude, on observe les distributions suivantes :

  • en bleu : les chèvres saines
  • en jaune-orangé : les chèvres infectées par des staphylocoques coagulase négative
  • en rouge : les chèvres infectées par des "pathogènes majeurs"

      

Distribution des résultats de concentrations cellulaires des chèvres
selon leur statut infectieux mamm
aire

 

  • La majeure partie des chèvres saines présente des résultats autour de 100 à 300 000 cellules par ml. Cependant, certaines d’entre elles ont des résultats parfois supérieurs à 1 ou 2 millions de cellules par ml
  • Les chèvres infectées par des staphylocoques coagulase négative ont majoritairement des résultats voisins de 600 à 700 000 cellules par ml mais pourront également avoir des résultats très élevés tout à fait équivalents à ceux obtenus en cas d’infections par des "pathogènes majeurs"
  • A l’inverse, si une forte proportion des chèvres infectées par des "pathogènes majeurs" a des résultats supérieurs à 5 000 000 de cellules par ml, on peut cependant avoir dans quelques cas des valeurs relativement faibles de 500 ou 600 000 cellules par ml

 

Ces distributions reflètent ce qui peut être observé sur un prélèvement ponctuel. La répétition des observations permet de fiabiliser l’information obtenue à partir des concentrations cellulaires.

 

Les informations individuelles collectées lors de plusieurs contrôles permettent d’avoir une bonne connaissance du statut de l’animal vis-à-vis des infections. Sur cette base, des règles de décision ont pu être définies.

     

Un décalage entre multiplication bactérienne et recrutement cellulaire

 

Attention : rappelons que les cellules ne sont que des indicateurs de la présence des bactéries lors des infections de la mamelle.

 

Le recrutement des globules blancs est la manière dont la mamelle réagit à l’agression des bactéries.

 

Il est donc toujours un peu décalé dans le temps par rapport à l’invasion bactérienne (décalage illustré sur la figure ci-dessous).

Croissance bactérienne et réponse cellulaire à l'infection

 

   

Par ailleurs, l'affrontement entre bactéries et cellules prend la forme d'une sorte d’équilibre instable, chaque "armée" prenant le dessus à tour de rôle.

 

Le cas le plus fréquent est de mettre en évidence simultanément des bactéries et de fortes concentrations cellulaires. Cependant, il peut arriver que les concentrations cellulaires soient élevées et que les bactéries phagocytées en grand nombre ne soient plus décelées lors de l'analyse bactériologique. Inversement, on observe parfois des concentrations cellulaires faibles ou modestes en présence de bactéries.

 

C'est pourquoi les règles d’interprétation des concentrations cellulaires ont été établies statistiquement en s'appuyant sur un grand nombre d’observations...

 

Enfin, si les concentrations cellulaires sont globalement bien corrélées à la présence des bactéries, il n'y a en revanche pas de relation évidente entre la quantité de bactéries excrétées et la réponse cellulaire, ceci d'autant plus que l'excrétion peut s'avérer intermittente et varie grandement au cours du temps...