Le secteur laitier est soumis à une forte volatilité des prix qui occasionne des crises récurrentes de revenu au niveau des exploitations. Cette volatilité des prix concerne aussi bien les produits que les charges, avec des évolutions qui ne sont pas toujours synchrones. La fréquence et l’ampleur des retournements de conjoncture nécessitent de disposer d’indicateurs plus précoces et réactifs que les constats réalisés a posteriori avec les bases de données comptables (RICA par exemple). L’Institut de l’élevage met à disposition des acteurs de la filière depuis la fin 2016, suite à la loi Sapin 2, un indicateur de marge laitière, la Marge IPAMPA Lait de vache sur Coût total indicé (MILC), directement dérivé de l’IPAMPA Lait de vache qui permet, lui, de mesurer, depuis l’accord dur le prix du lait de 1997, l’évolution du prix du panier de charges spécifique à la production laitière.
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Pour MILC et l’IPAMPA Lait de vache, on utilise des paniers de produits et de charges fixes, rebasés tous les 5 ans à partir d’exploitations réelles (les mêmes pour l’IPAMPA Lait de vache et MILC). Les valeurs mensuelles de MILC et d’IPAMPA Lait de vache sont obtenues en faisant évoluer les différents postes de produits et de charges de la même façon que les séries de la statistique publique (prix du lait SSP - FranceAgriMer, cotations hebdomadaires des bovins FranceAgriMer, séries élémentaires de l’IPAMPA général publié par l’INSEE pour chaque poste de charges indicé, cf méthode IPAMPA élevage). La Marge IPAMPA Lait de vache sur Coût total indicé (MILC) est obtenue chaque mois par différence entre les valeurs du panier de produits et celle du panier de charges, exprimées en euros pour 1000 litres, puis est convertie en indice (désormais en base 100 pour 2015).
A l’occasion du rebasement de 2015, la méthode de calcul de l’IPAMPA Lait de vache et de MILC a été modifiée afin de se rapprocher de l’évolution des résultats économiques des exploitations laitières dont le prix est le plus soumis à la volatilité (la grande majorité des exploitations françaises, hors AB et certaines AOP). Plusieurs changements ont été opérés :
Les caractéristiques des exploitations mobilisées pour calculer l’IPAMPA Lait de vache et MILC en 2010 et 2015 sont comparées ci-dessous. Par construction, les exploitations retenues en 2015 sont plus nombreuses, plus grandes et plus diversifiées et sont moins fréquemment situées en montagne ou piémont.
Comparaison des caractéristiques des échantillons d’exploitation utilisés pour établir la structure des paniers de produits et de charges en 2010 et 2015
| Exploitations laitières spécialisées | Exploitations laitières | |
2010 | 2015 | 2015 | |
Nombre exploitations (échantillon) | 702 | 674 | 1343 |
Nombre exploitations (extrapolé) | 31523 | 30183 | 52796 |
UTA | 1.71 | 1.75 | 2,01 |
Dont non salariés | 1.59 | 1.57 | 1,74 |
Dont salariés | 0.12 | 0.18 | 0,27 |
SAU (ha) | 71 | 78 | 112 |
SFP (ha) | 58 | 65 | 73 |
%SFP | 82% | 83% | 65% |
Nombre de vaches laitières (VL) | 47 | 54 | 59 |
Lait/VL (l/an) | 6 174 | 6 591 | 6 919 |
Lait par exploitation (l/an) | 290 200 | 355 900 | 410 550 |
Lait/ha SFP | 5 003 | 5 475 | 5 626 |
UGB/VL | 1.62 | 1.63 | 2,00 |
UGB/ha SFP | 1.31 | 1.35 | 1,63 |
% montagne piémont | 41% | 40% | 20% |
(% montagne-piémont, toutes exploitations laitières) | 24% | 24% | 24% |
Prix du lait €/1000l |
| 357 | 325 |
Source : Agreste RICA – traitement Institut de l’Elevage
La structure des paniers de charges et de produits retenus dans les IPAMPA Lait de vache et MILC, pour 2010 et 2015, figurent dans le tableau ci-dessous. Le poids plus élevé des aliments achetés s’explique par la hausse du prix unitaire des aliments achetés entre 2010 et 2015 (+19% pour l’indice aliments achetés de l’IPAMPA Lait de vache) et par l’évolution de l’échantillon (les exploitations de polyculture-élevage de plaine utilisant plus d’aliments pour produire un litre de lait). Les postes engrais et charges fixes (biens d’investissements et frais généraux) évoluent en raison de l’évolution de l’échantillon (notamment la taille et la localisation des exploitations) et du passage d’une méthode « charges totales d’exploitations presque spécialisées ramenées au litre de lait » aux charges de l’atelier lait.
Comparaison des paniers de produits et de charges utilisés dans IPAMPA Lait de vache et MILC pour 2010 et 2015
| IPAMPA Lait et MILC 2010 | IPAMPA Lait et MILC 2015 | ||
| €/1000 l | % | €/1000 l | % |
Panier de charges |
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Aliments achetés | 73,4 | 22% | 91.82 | 32% |
Produits vétérinaires et services | 18,1 | 6% | 18.93 | 7% |
Engrais et amendements | 18,9 | 6% | 13.81 | 5% |
Semences | 12 | 4% | 8.75 | 3% |
Produits de protection cultures | 8,8 | 3% | 7.18 | 2% |
Energie et lubrifiants | 24,5 | 7% | 23.64 | 8% |
Fournitures | 16,3 | 5% | 11.67 | 4% |
Entretien du matériel | 19,7 | 6% | 16.83 | 6% |
Entretien des bâtiments | 4,6 | 1% | 3.89 | 1% |
Frais généraux | 36,8 | 11% | 25.74 | 9% |
Sous total : Biens et services de consommations courantes | 233 | 71% | 222.25 | 77% |
Matériels et installations | 63 | 19% | 46.64 | 16% |
Bâtiments | 32 | 10% | 21.18 | 7% |
Sous total : Biens d'investissement | 95 | 29% | 67.82 | 23% |
Charges indicées dans l’IPAMPA Lait de Vache, et utilisées pour MILC | 328 | 100% | 290.07 | 100% |
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Panier de produits |
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Lait de vache | 350.2 |
| 325.39 |
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Co-produit viande bovine | 61.9 |
| 48.13 |
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Dont veaux de 8 jours | 7.9 |
| 5.10 |
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Dont vaches de réforme | 29.8 |
| 30.36 |
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Dont autres (génisses, et quelques mâles en 2010) | 24.2 |
| 12.67 |
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Cultures de vente (ventes, hors intraconsommation) | 30.3 |
| 0 |
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Produits indicés dans MILC Lait de Vache | 442.4 |
| 373.52 |
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Source : Agreste RICA – traitement Institut de l’Elevage
La corrélation entre l’indicateur MILC, calculé de façon très simple (paniers fixes de charges et de produits avec actualisation des prix unitaires de ventes et d’achats), et la marge par litre (de même périmètre que MILC) constatée année après année en regroupant les exploitations du RICA par trimestre de clôture est élevée (r=0,89; cf graph ci-dessous). Car sur la période 2007-2016, l'indicateur a anticipé assez fidèlement les conséquences économiques de conjonctures favorables (2007, 2011, 2014) ou défavorables (2009, 2015-16: prix du lait; 2012: prix des charges) à la production laitière.
(NB: cercles proportionnels aux effectifs d'exploitations par date de clôture)
La corrélation reste très significative avec la rémunération permise pour la main d'oeuvre affectée à l'atelier lait, mais elle est plus faible (r=0,73; cf graph ci-dessous). En effet ce dernier calcul, obtenu après calcul des coûts de production complets de l'atelier lait (et non pas des seules charges suivies dans le cadre de l'IPAMPA lait, 70% environ) tient également compte de la totalité des produits affectés à l'atelier (dont les aides de la politique agricole). Ces éléments non intégrés à MILC ne peuvent pas être actualisés mensuellement avec la méthode retenue pour l'IPAMPA Lait de vache et MILC. Ils font l'objet de calculs annuels à partir du RICA (voir article De MILC aux coût de production et prix de revient du lait de vache à partir du RICA).
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Une valeur absolue isolée de la marge MILC (une marge hors aides, ni marge brute, ni marge nette) ne peut pas être interprétée facilement en tant que telle, faute de repères usuels. L’interprétation doit être faite en comparant son niveau avec les niveaux atteints dans le passé en moyenne ou durant des périodes jugées comme favorables ou défavorables, voire de crises économiques pour la production laitière. La marge MILC connaît des fluctuations saisonnières importantes liées au prix du lait et aux prix des bovins (vaches de réforme, veau). Ces valeurs brutes non désaisonnalisées sont à considérer avec précaution car les paniers de produits et charges sont fixes, indépendants du mois. Le résultat du lissage des 12 derniers mois doit également être observé en parallèle. Par ailleurs, du fait des révisions des séries de prix de produits et de charges (IPAMPA), la MILC d'un mois donné est, comme ces séries, susceptible d'être légèrement révisée plusieurs mois après sa première publication.